
Cuisine zéro déchet : comment utiliser les fanes et épluchures
Pourquoi jeter ce qui peut être cuisiné ?
Chaque année, 10 millions de tonnes de nourriture sont jetées en France. Parmi elles, une énorme part provient des foyers, et plus précisément, d’ingrédients parfaitement consommables comme les fanes de carottes, les épluchures de pommes de terre ou les trognons de pommes. Alors pourquoi ces parties finissent-elles automatiquement à la poubelle, alors qu’elles peuvent parfaitement finir dans l’assiette ?
La réponse tient souvent à une habitude ancrée : celle de considérer certaines parties des légumes comme des déchets. Pourtant, avec un peu de connaissance et quelques idées simples, ces « restes » peuvent devenir des ingrédients à part entière. Et ça, c’est une aubaine pour qui cherche à réduire son impact écologique tout en optimisant son budget alimentaire.
Fanes, trognons, épluchures : tout est bon dans le légume
Pour adopter une cuisine zéro déchet, il faut d’abord élargir notre définition de ce qui est comestible. Non, les fanes de radis ne sont pas juste de la décoration verte en haut de votre botte. Et non, les pelures de pommes de terre ne sont pas à bannir par principe. Voici quelques exemples concrets d’utilisations :
- Fanes de carottes ou de radis : mixées avec de l’huile d’olive, des graines de tournesol ou des noix, un peu de citron et du sel, elles font un pesto surprenant et savoureux.
- Épluchures de pommes de terre : rincées, assaisonnées et passées au four, elles deviennent des chips ultra croustillantes. Zéro gâchis, et maxi plaisir à l’apéritif.
- Tiges de brocolis : pelées légèrement pour retirer la partie fibreuse, on les sucre lentement à la poêle ou en soupe, elles apportent une douceur insoupçonnée.
- Trognons de pommes (bio !) : infusés dans de l’eau chaude avec de la cannelle et un clou de girofle, ils donnent une tisane au goût subtil tout en parfums naturels.
Une seule règle : toujours cuisiner des produits issus de l’agriculture biologique ou de sources sûres, surtout lorsqu’on travaille avec les parties non protégées ou souvent traitées (comme les pelures).
Bien laver, bien stocker : les bases pour cuisiner les “déchets”
S’engager dans la cuisine zéro déchet impose un minimum de rigueur. Première étape : le lavage. Les épluchures de légumes, même bio, peuvent contenir des résidus de terre, des traces de manipulation (chaîne de transport, main du voisin en rayon…) ou des impuretés naturelles. Voici comment procéder :
- Brosser les légumes sous l’eau claire avec une brosse dédiée (évitez les éponges usées… sources bactériennes garanties).
- Essuyer les fanes et herbes avec un torchon propre pour éviter qu’elles ne se détériorent trop vite au frigo.
- Stocker les éléments non utilisés dans des bocaux au frais ou les congeler par portion pour les cuisiner plus tard (bouillons, sauces, gratins… les possibilités sont vastes).
Si vous vous demandez si tel ou tel élément peut se consommer, la première étape est de poser cette question simple : est-ce comestible cru ou cuit ? Si la réponse est oui dans les deux cas, il y a de grandes chances que la créativité puisse opérer !
Pesto de fanes, chips d’épluchures : 3 recettes testées et approuvées
Rien de mieux que quelques recettes simples pour passer à l’action. Simples, faisables dans une cuisine de 10 m² sans matériel de chef, et surtout gourmandes.
Pesto de fanes de carottes
- Une botte de fanes de carottes bien lavées
- 2 gousses d’ail
- Une poignée de graines de tournesol ou de noix
- 5 cuillères à soupe d’huile d’olive
- Jus de citron, sel, poivre
Mixez le tout dans un robot. Ajustez la texture avec un peu d’eau ou d’huile selon votre goût. Se conserve 5 jours au frigo. À tartiner, à mélanger aux pâtes ou à intégrer dans une vinaigrette maison.
Chips d’épluchures de pommes de terre
- Les épluchures d’environ 5 pommes de terre bio
- Huile d’olive, paprika, sel, poivre (autres épices au choix)
Préchauffez le four à 180 °C. Rincez, séchez, assaisonnez. Étalez sur une plaque, sans les superposer. Cuisson : 15 à 20 minutes. À surveiller, les bords grillent vite. Résultat : croquant, économique et addictif.
Soupe anti-gaspi de tiges et épluchures variées
- Tiges de brocolis, épluchures de carottes, fanes de poireaux, oignons avec leurs peaux
- Un litre d’eau, une pomme de terre coupée en dés, du sel, des herbes (thym, laurier)
Faites revenir les éléments dans une casserole avec un peu d’huile. Couvrez d’eau, ajoutez les aromates, laissez mijoter 30 minutes. Mixez, ajustez. On obtient une soupe douce et riche en goût – l’exact contraire de ce qu’on imaginerait avec des “déchets”.
Et les déchets qui restent ?
Même quand on fait attention, il restera toujours des parties non consommables : noyaux, peaux trop épaisses, parties abîmées. Pas question de les jeter. Direction le compost, si vous en avez un. En appartement, il existe désormais des bokashis ou des lombricomposteurs efficaces, encombrement réduit garanti. Ce qui n’est pas transformé peut tout de même servir… à nourrir la terre.
Pas envie de gérer un compost chez soi ? Renseignez-vous : de nombreuses villes ont installé des composteurs collectifs dans les quartiers ou les jardins partagés. Quelques recherches suffisent pour vous éviter une poubelle malodorante et participer à une boucle vertueuse.
L’organisation : la clé de la cuisine zéro déchet
Pour que ça fonctionne dans le quotidien, il faut un minimum d’anticipation. Voici une méthode simple utilisée ici depuis longtemps : le “bac à cuisiner”. Il s’agit d’un simple contenant au frigo ou au congélateur, dans lequel vous stockez les parties intéressantes non utilisées (ex : tiges, peaux, fanes…). Quand c’est plein, vous décidez ce que vous en faites : un bouillon, une soupe, une poêlée.
Avantage : vous ne cuisinez pas “obligé” à chaque préparation, mais seulement une fois que vous avez de quoi faire un vrai plat. Cela limite la pression mentale et évite que cette démarche ne devienne une charge de plus au quotidien. Car oui, cuisiner durable, c’est bien… mais il faut que ce soit viable dans la durée.
Mieux acheter pour moins jeter
Enfin, rappel essentiel : pour cuisiner les épluchures, il faut des légumes de qualité. Cela ne veut pas dire forcément dépenser plus. Acheter en circuits courts, apprendre à choisir des légumes moches mais sains, privilégier les variétés locales et de saison, c’est souvent moins cher et bien meilleur.
Une petite astuce : discutez avec votre maraîcher. Souvent, les fanes sont coupées pour que la botte prenne moins de place. En les demandant expressément, on vous les donne gratuitement. Même chose pour les tiges ou les trognons : en fin de marché, vous pouvez récupérer des légumes “invendables” qui n’attendent qu’un coup de couteau pour se transformer.
Un outil de changement durable
Revaloriser les restes, c’est améliorer sa cuisine, mais c’est aussi poser un geste politique. Réduire ses déchets organiques, cuisiner avec créativité, optimiser chaque ressource, voilà des actes concrets qui parlent autant que de longs discours. Et qui, à force d’exemple, participent à changer les normes.
Alors, la prochaine fois que vous épluchez une courgette, posez-vous la question : suis-je en train de jeter de la nourriture ? Bien souvent, la réponse pourrait être “oui – mais plus pour longtemps.”